Vous connaissez tous le “chitter-chatter”. C’est un concept développé depuis des années par Stephen Madigan sur la façon dont les discours sociaux dominants “parlent” dans nos têtes pour nous recruter dans un certain nombre de pratiques performatives au service de leurs propres buts.
Le club des entendeurs de voix, c’est l’ensemble des praticiens confrontés à ces petites voix parasites qui les empêchent de poser librement des questions narratives à leurs clients et se mettent en travers de leur capacité à fabriquer de belles questions.
Un dispositif relativement complexe de conversation narrative avec trois “clients”, deux thérapeutes et une équipe réfléchissante nous a permis de connaitre un peu mieux le mécanisme et les activités de ces petites voix (qui ne sont pas vraiment des voix que l’on entend au sens “schizophrénique” du terme mais plutôt la mise en actes d’idées ou de convictions qui influencent notre vision de nous-mêmes).
Ceci nous suggère également pour le coaching une façon entièrement différente d’interviewer une équipe, qui fait soudain sembler le traditionnel tour de table comme une pratique flottante et non influente. De même, le fait de faire travailler les gens en petits groupes et de recueillir les retours de de travail sans les interroger narrativement en profondeur s’oppose vraisemblablement à une véritable “ethnographie critique” (Epston) de l’équipe et de ses compétences à résister aux problèmes.
A quoi les membres du comite de direction résistent-t-ils lorsqu’ils trainent a mettre en oeuvre les actions qu’ils ont décidées eux-mêmes deux mois plus tôt ? Nous externalisons les problèmes, mais nous avons tendance à internaliser les compétences, à les voir comme une partie de notre personnalité au lieu de nous souvenir que chaque chose avec laquelle nous nous engageons est relationnelle et construite en relation. Il n’y a pas de gène de la compétence (Madigan).
Nous devons vraisemblablement revisiter un certain nombre de pratiques d’intervention en coaching narratif à la lumière de ces idées, afin de nous montrer beaucoup plus influents, et nous tenir aux côtés de nos clients face aux problèmes au lieu d’observer les ravages des problèmes dans la vie des entreprises dans une posture d’impuissance que nous confondons parfois avec la posture décentrée.
Quelle fierté pour moi d’avoir fait partie aujourd’hui de la communauté des praticiens narrapeutes qui ont découvert qu’ils se retrouvaient aussi dans le “club des entendeurs de voix” !
D’autres commentaires viendront sur ce texte magnifique de Pierre en re-narration … j’ai besoin d’abord de laisser poser ce si “raffraîchissant remue méninges” !
Mille merci pour ces moments vécus en densité !
Sophie