Christophe Dejours : “l’identité comme armature de la santé mentale”

Par Sandie Rimbert

Christophe Dejours (psychiatre, psychanalyste, à la tête de l’équipe de psycho-dynamique du travail et de l’action du CNAM) était invité par la Ligue des Droits de l’Homme de Gironde il y a quelques jours à Bordeaux II.

En dehors de quelques percées médiatiques, je ne connaissais rien des travaux de ce chercheur aujourd’hui régulièrement sollicité par les organisations dans le cadre de son approche sur la souffrance au travail.

Je retiens d’abord sa définition de l’identité comme « armature de la santé mentale», expression qui éclaire d’un jour nouveau le travail d’exploration du paysage de l’identité. Aider nos clients à se reconnecter à leurs rêves, leurs espoirs, leurs valeurs, permet aussi de ne pas devenir fou à force d’être à côté de soi.

Le travail, s’il génère nécessairement de la souffrance en confrontant les individus à leurs limites, constitue après l’enfance, une seconde chance pour construire son identité. Nous voilà dans le paysage de l’action, des missions professionnelles et en cheminant encore, au sens attribué au travail accompli. En effet, « le destin de cette souffrance inévitable n’est pas joué » : il peut se transformer en plaisir si les réalisations contribuent à donner du sens à sa vie, permettent de se sentir utile, si elles respectent et honorent les choses précieuses pour soi. Mais ce destin peut aussi tourner au cauchemar et conduire une déstructuration identitaire, à force de frustrations, d’incohérences, de sentiment d’échec et de vide.

J’ai été aussi sensible à l’image du « flic à l’intérieur de soi » pour caractériser les nouvelles organisations entrées dans l’ère de l’autocontrôle. Cette métaphore m’a ramenée très naturellement à celle du panopticon, prison ultramoderne illustrant à merveille les ravages insidieux du  pouvoir moderne et expliquant le travail rusé d’externalisation pour en sortir.

Pour en sortir aussi, C.Dejours se propose d’investir sur ce qu’est la coopération, d’en analyser, comprendre les rouages pour mieux la protéger et doter les individus au travail des compétences permettant de l’honorer. Voilà les merveilleux sujets d’investigation du chercheur : la solidarité, le respect, l’échange, le lien social.

Une voie déjà empruntée par les praticiens narratifs mais plus on est de fous….