UN MONDE SANS FROTTEMENTS

“La valeur du temps”, tel est le thème cette année de l’Université d’été du CECA (Centre Entreprise et Communication Avancé) qui a lieu aujourd’hui et demain au Château Smith Haut-Laffitte, près de Bordeaux.

“Le temps réel, c’est le monde sans frottements. Or la vraie vie, en physique comme dans la réalité, c’est plein de frottements”. Selon Isabelle Sorente, Polytechnicienne, écrivaine et femme de théâtre, nous sommes co-acteurs de l’addiction à l’interdépendance, pas celle de l’aile du papillon décrite par les mystiques bouddhistes mais celle imposée par l’information et la connexion permanente. Chaque chose devient mesurable et les chiffres remplacent la chose. L’addiction aux chiffres donne une illusion de maitrise qui nous permet de lutter contre l’angoisse de l’incertitude, d’être pris dans une guerre de titans entre les machines indifférentes et la nature indifférente où notre place d’humains n’existe pas. 

Nous ne faisons pas la guerre contre les machines comme dans les films de SF, nous essayons de nous adapter et de suivre les machines, de leur ressembler, d’être aussi performants et fonctionnels qu’elles. Comment rester humains au cœur de la tempête autrement qu’en alternant des phases psychorigides et des sur-compensations émotionnelles dès qu’il se produit une catastrophe dans le monde, alternance qui est un symptôme de notre addiction ? 

La Bhaggavad Gita nous donne t-elle des clés pour trouver le salut au coeur de l’action ? Ou alors la flexibilité recommandée au Prince par Machiavel ? Il y a une grande noblesse dans la condamnation de vivre dans un monde en temps réel, mais comment faire pour ne pas imiter une machine ? Mais il y a une chose que les machines ne savent pas faire, c’est se mettre a la place de l’autre. Une société où le temps manque, c’est une société où les autres manquent. Pour Mme Sorrente, la compassion, le “care”, recèlent un espoir ainsi que l’apparition des “hommes d’action philosophes” qui accompagnent “l’anthropocène”. 

Mais ce “notre monde”, que décrit Mme Sorente, est-ce qu’il n’oublie pas au passage l’infinie diversité des communautés humaines et des réponses qu’elles ont élaborées pour leur vie ? Cette addiction généralisée n’est-t-elle pas avant tout la maladie des Lumières propagée par la culture économique dominante du profit ? Comment des communautés évoluées socialement  mais économiquement dominées peuvent-t-elles faire valoir leur sagesse face aux haut-parleurs déchaînés de la folie capitaliste ? 

2 réflexions au sujet de « UN MONDE SANS FROTTEMENTS »

  1. Certaines communautés évoluées socialement expriment leur sagesse dans leur façon consciente et frugale de consommer, (cela va du produit financier à la baguette de pain) si les gens savaient la puissance qu’ils ont, la puissance que nous aurions tous ensemble ! mais l’histoire dominante ne parle que de notre impuissance grandissante notamment symbolisé par notre perte de pouvoir d’achat (le seul qui compte pour les économistes ).
    D’autres refusent d’entrer dans la modernité. Et nous pouvons les soutenir. Je pense par exemple aux Indiens du Brésil qui risquent de mourir par la destruction de leur cadre de vie (forêt, zone de pêche) par la construction du grand barrage de Bel Monte sur le Xingu, grande autoroute pour faire avancer la civilisation moderniste . Car le « notre monde » a une faiblesse, il lui faut de gros moyens en matières première, énergies, vies .. .. Alors puisque l’on parle de temps , il n’en reste peut-être plus tant que cela à « notre monde » !

    PS: pourquoi le temps réel serait sans frottement? Le temps réel s’accumule.

Les commentaires sont fermés.