Archives pour la catégorie Histoires alternatives

Où Cyrano de Bergerac prend position pour sa vie de poète

Par Catherine Mengelle.

Voici une magnifique carte de prise de position, sous la forme d’une tirade fameuse de la littérature française. Vous pouvez la lire ci-dessous, mais vous pouvez aussi écouter comment Depardieu s’en empare (voir sur Utube, tirade des Non merci).

On y trouve l’exposé du problème : Le Bret essaie de convaincre Cyrano de devenir le poète personnel d’un personnage influent, et peut-être même un nom : Lierre Obscur.

On y trouve un public, témoin de la scène : les Cadets.

On y trouve les effets de Lierre Obscur et on y apprend ce que Cyrano pense de chacun des effets : « Non merci ! ». On ne peut émettre plus claire évaluation des effets d’un problème !

Sait-on ce que cette évaluation dit de ce qui est important pour lui, comment il explique sa prise de position ? Mais oui : toute la fin de la tirade est dédiée à son identité préférée de poète.

Nom du problème, effets du problème, évaluation des effets, explication de l’évaluation, tout ça dans une tirade en vers de la littérature… la littérature et les histoires qu’elle raconte m’en apprennent toujours beaucoup plus que les livres de développement personnel. Continuer la lecture de Où Cyrano de Bergerac prend position pour sa vie de poète 

NARRATIVE KITCHEN

Fabrice AimettiUne série de “retellings” concoctés par notre Wikimaster Fabrice Aimetti à partir des mots et expressions d’un Groupe de 9 femmes (et un homme) d’origine étrangère que nous avons accompagnés dans le cadre du PLIE des Sources de Pessac (Gironde).

Ce groupe, “Sagesses de vie”, a produit de nombreux récits identitaires et mosaïques d’expériences au cours de 10 réunions narratives qui se sont échelonnées de mai à octobre. Reconstruction d’un récit identitaire alternatif à l’identité problème de chômeur étranger, recettes de vie, représentations culturelles, projets vocationnels, etc. ont été en permanence au programme de ces rencontres sensibles, richement documentées par Fabrice. Voir ici son blog Chroniques Narratives.

FORMER AU MANAGEMENT OU FORMER AU COURAGE ?

Par Noëllyne Bernard

L’histoire collective est la suivante : Nombre de formateurs, de coachs, de consultants, de cabinets spécialisés, d’experts, de profs « forment » au management et bien sûr les entreprises achètent, les institutions dédiées financent, et les managers sont formés…

Dans cette histoire chacun, tente de croire ou pas, à l’efficacité, voir à l’efficience de la formation au management. La représentation de ces formations, commune à toutes les parties prenantes repose le plus souvent sur : Comment agir et communiquer avec les autres, en situation de management, Comment déléguer en motivant, Comment organiser le travail, son temps, Comment développer des comportements efficaces, Comment gérer ses émotions, Comment adapter le style de management à la situation, Comment donner du sens. Voir comment devenir un manager coach … Continuer la lecture de FORMER AU MANAGEMENT OU FORMER AU COURAGE ? 

UNE LEÇON DE RENÉGOCIATION DU RÉCIT

Judith est la fille d’une de nos collègues narratives. Elle se bat depuis toujours contre une histoire très puissante et très moche, qui a tendance à dévaster sa vie sociale : le poly-handicap.

Toute sa communauté a entrepris de parler différemment de Judith, avec la complicité de Julien Vergé, un créateur de dessins animés. Le résultat est là, un petit chef d’oeuvre d’intelligence, de poésie et d’émotion. “Sacrée Judith et le mur de la différence”, ou comment faire un croche-pied à une sale histoire dominante et honorer les résistances… en 7 minutes.

UNE AUTRE HISTOIRE

Les cultures dominantes disqualifient les autres en les qualifiant de primitives et se qualifient elles mêmes de seule voie possible et de “vraie vie”. Mais il existe d’autres récits et des options différentes. Aider une histoire alternative à se déployer c’est à la fois respecter la volonté de ceux qui ont accepté de se raconter pour ne pas disparaître et proposer un exercice de décentrage qui rend très exotiques et parfois très pathétiques nos coutumes et nos pratiques. Seul, reste l’art, qui transperce et traverse l’humain avec une résonance universelle. Quelle leçon de civilisation, en effet !

Qu’est-ce que le réel ?

google-recherche-temps-reelL’une de mes clientes me dit : “je me rends compte que j’ai passé ma vie à rêver ma vie au lieu de la vivre”.

Et aussi : “je n’ai jamais été en contact avec le réel”. Mais en termes d’approche narrative, cela a t-il un sens de distinguer d’un côté, une réalité solide et objective, comme une chaîne de montagnes immuable avec laquelle on pourrait être en contact, et de l’autre côté le rêve, c’est à dire une histoire fantasmagorique que l’on se raconte pour donner un sens à sa vie ? Pas sûr du tout…

Continuer la lecture de Qu’est-ce que le réel ? 

Un horrible conte de Noël

pere-noel-coca-cola-19311

Nicole dit que Michel ne sait pas choisir les cadeaux de Noël. Michel répond qu’il n’aime pas faire des cadeaux.

Je suggère alors que faire des cadeaux est un apprentissage qui passe notamment par le fait d’en recevoir, et que Michel n’en a peut-être pas souvent eu l’occasion. Avec beaucoup d’émotion, il me raconte l’histoire suivante qu’il date de ses 6 ou 7 ans : il venait d’un milieu assez pauvre et la tradition familiale était de ne pas faire de cadeaux à Noël. Un jour, pourtant, il trouve un paquet à son nom sous le sapin. Le coeur battant, il l’ouvre. Sous le papier cadeau et la ficelle brillante, il trouve… un martinet.

Continuer la lecture de Un horrible conte de Noël 

Putting Shame to Good Use

minst_re_de_la_honte_mOne of the very interesting topics discussed on the second day of Rob, Shona and Maggie’s workshop was the narrative use of shame.

Leaving the problem’s “territory” to create new landscapes, celebrating differences instead of controlling and molesting others to make them similar: this is the objective of the journey of men who use violence, an essential stage of which consists in becoming able to “walk in someone else’s shoes” in order to develop a plural understanding of life fed by multiple narratives.

Experiencing shame plays an important role in therapy with men who use violence. Shame offers a starting point for conversations on the absent-but-implicit of shame: “What kind of man do you want to be and does this shame refer you to?” This is a kind of door that can be opened, leading to the idea that being responsible does not mean accepting “guilt” or falling into repentance, but rather remaining in contact with an ethical feeling (A. Jenkins), with the impact of our life choices and practices on the lives of those around us, and with our identity project (who we want to be).

Continuer la lecture de Putting Shame to Good Use 

“Croisements narratifs” enfin en ligne !

p1000347_23

Le site-blog de Béatrice Dameron est en ligne depuis hier (voir ici), tout à son image : érudit mais pas ennuyeux. Elle commence par une pièce maîtresse : la traduction en français de l’article cultissime de Stephen Madigan, “the eight habits…”
Merci Béatrice !

L’un des freins à la diffusion des idées narratives en France est la rareté du matériel théorique disponible en traduction française. A cet égard, la parution tant attendue de la traduction de “Maps” (le dernier dans les deux sens du terme hélas ouvrage de Michael White) le mois prochain chez Satas est une excellente nouvelle pour toute la communauté narrative francophone. Egalement à la rentrée, chez Interéditions, la sortie de “Comprendre et pratiquer l’approche narrative”, un ouvrage collectif d’une vingtaine de praticiens français qui présentent des cas expliqués (avec un long article de Michael White inédit en français), et la création à la Fabrique Narrative de notre propre pôle d’édition dont l’une des premières publications sera la traduction par Catherine Mengelle de “What is narrative therapy ?”, un livre clé d’Alice Morgan qui nous a vraiment soutenus dans cette entreprise de traduction, au même titre que les dirigeants du Dulwich Center d’Adelaide.

Continuer la lecture de “Croisements narratifs” enfin en ligne ! 

Le Bounty, école de management

revoltes-du-bounty-p12

La DRH d’un grand établissement hospitalier du Sud Ouest dit souvent que : “le DRH, c’est le dernier à avoir les pieds mouillés”.

Cette réflexion se télescope avec la rediffusion récente des “révoltés du Bounty” qui nous offre une admirable réflexion sur le management autour de l’histoire de Christian Fletcher, honnête homme et copilote du vaisseau éponyme qui finit par se mouiller les pieds et le reste en prenant la tête d’une mutinerie contre le cruel Capitaine Blye. Plusieurs conceptions du management et plusieurs systèmes de valeurs s’affrontent sur ce paradigme vivant de l’entreprise qu’est un grand trois-mâts engagé dans une mission vitale : rapporter pour son actionnaire des plants d’arbre à pain qui lui serviront à améliorer ses profits en nourrissant à bas prix les esclaves employés dans ses filiales, pardon, ses domaines.

Le Capitaine Blye est l’archétype du dirigeant de filiale traditionnel, incarnant ce que l’on appelle le management par la terreur, un management où la peur est vue comme le principal driver des collaborateurs et où la mission (augmenter les profits de l’actionnaire) passe avant tout le reste. Ainsi, pour arroser les fameux plans d’arbre à pain, l’eau est prélevée sur les rations de l’équipage qui meurt de soif. Le temps et la rapidité sont une obsession dans ce type de management, et aucune autre opinion que celle du Capitaine n’y est concevable.
Continuer la lecture de Le Bounty, école de management