VOUS AVEZ DIT OUVERTURE ?

Par Jean-Louis Roux

Comme pour d’autres conférences narratives, celle de Vancouver s’est ouverte avec des chants. (une chanson composée justement par Cathy Richardson, la collègue dont il est question ci-dessus – NDLR)

Stephen Madigan à ouvert la conférence en nous faisant part de ses travaux sur l’individualisme, sa progression et ses effets sur les personnes et le monde. Il nous rappelle aussi les références importantes desquelles il puisse les idées qu’il met en avant en parlant des auteurs comme Foucault et Derrida. Pour soutenir l’importance de ces références, John Winslade avec qui nous avons passe deux jours à la Fabrique Narrative en compagnie de Lorraine Hedtke, sa compagne, anime un workshop sur la théorie de ces auteurs.

Après toute les émotions de cette journée, ainsi que celle de vendredi, après avoir entendu toutes ces belles techniques sur les pratiques narratives, tous ces thérapeutes expliquer comment ils pouvaient aider les gens et comment ils les aidaient, je suis parti faire ma marche quotidienne pour m’aérer. J’ai décidé de faire le tour du parc Stanley. Le parc Stanley est un immense écran de verdure à la pointe de Vancouver qui donne dans la baie des Anglais, baie des Anglais qui s’ouvre sur le Pacifique. Cette promenade est magnifique : des plages ou se côtoient d’énormes rochers ronds dont on se demande comment ils ont bien pu rouler jusqu’ici, jeu de billes probablement de géants, ou d’esprits indiens ayant façonné cette contrée

Je marche le long de la plage et ce soir, je rencontre des animaux. Un couple de bernaches avec cinq petits, puis au détour d’un virage de ce chemin qui longe la baie et ses méandres, je tombe nez à nez avec un immense aigle à tête blanche, symbole des États Unis. Celui-la est magnifique. Je poursuit ma route, et il semble qu’il n’y ait que moi qui aperçoive ces animaux. J’ai l’impression que les gens de Vancouver ne voient plus rien. Ils font du vélo, ils courent, ils font leur jogging les écouteurs visés sur les oreilles, ils font du bruit certes, ils sont là, ils vivent dans cette nature magnifique ! Soudain, devant moi deux phoques. Ils doivent se demander à quelle heure ils vont pouvoir accoster les plages, à quel moment nous allons libérer ce bord de côte, ce bord de chemin pour qu’ils puissent venir se reposer pour la nuit probablement. Il est clair que personne ne les voit. Tout le monde est indifférent à leur tentative d’abordage, sauf peut être le héron qui pêche au pied du pont, ce pont magnifique que j’ai sous les yeux, un pont suspendu, immense, qui traverse le chenal qui permet de sortir de la baie qui forme le port de Vancouver.

C’est aussi l’heure ou sortent d’énormes paquebots de croisière blancs, avec des gens qui font crépiter les flashs de leur appareil photo, j’imagine être sur des dizaines de photos prises par ces passagers allant vers le nord canadien pour découvrir les grands espaces sauvages, peut être vont-ils à la rencontre des baleines. Pour l’instant les deux phoques me tiennent compagnie. Ils continuent à pointer le bout de leur nez hors de l’eau afin d’observer s’il est possible d’accoster sans danger. Plus loin un grand héron est en train de pêcher, magnifique, majestueux, il fait plus d’un mètre de haut. Des voiliers sortent et je me demande vers quelles destinations ils partent à l’heure ou le soleil se couche, ou la nuit commence. Je retourne vers la ville pour aller me sustenter de quelques nourritures. Au détour du parc dans l’horizon, les grandes grues rouges du port de Vancouver se dessinent, elles sont magnifiques, elles déchargent à longueur de temps des cargos et des bateaux en provenances du monde entier, je suppose.

Pour en revenir à la journée d’aujourd’hui, effectivement Norman ce matin a été magnifique, si particulier, tellement puissant dans sa démonstration pour nous faire comprendre à quel point nous ne comprenons pas le handicap et à quel point nous avons des jugements de valeurs sur les personnes handicapés. La journée s’est poursuivie avec cette après-midi une interview de Madigan, interview qui a porté sur les couples, qu’il nous déjà donnée à voir à Arcachon, mais avec la forme de questionnement utilisée dans les conférences TC, c’est à dire deux personnes interviewent le thérapeute à partir de son travail, en ayant une posture décentrée mais influente, est fondamentalement intéressant. On n’est plus face à des conférenciers guindés derrière leur pupitre, (quoique !!!!!!)

Aujourd’hui une participante a dénonce l’emploi de la langue coloniale qu’est l’anglais, mais aussi l’emploi d’une autre langue coloniale qui est la sienne, l’espagnol. Je n’ai rien ose penser du colonialisme français.
J’aurais aimé après cette déclaration là, qu’elle fasse son intervention dans sa langue d’origine, quelle qu’elle soit, indienne, amérindienne, turque ou javanaise, mais qu’au moins elle nous fasse la surprise d’aller jusqu’au bout de ce qu’elle dénonce. C’est toujours un peu décevant, les gens qui annoncent des choses et qui ne prennent jamais le contrepied. J’aurais aimé voir la tronche de 400 participants devant une personne qui leur parle en javanais, c’eût été incompréhensible pour tout le monde et au delà de cela, absolument délicieux de pouvoir entendre cette femme s’exprimer dans sa langue. Ceci étant dit, elle abordait un sujet grave, celui des violences faites aux femmes qui ne souffre d’aucune ironie ici.

Ce parc est aussi un lieu ou sont présents des arbres magnifiques des red cedars probablement, ce bois magnifique d’une couleur rousse, imputrescible et servant encore aujourd’hui à la finition extérieure de nombreuses maison en bois. J’aime leur tronc filiforme qui s’élève vers le ciel et qui préfigure du gigantisme de ces arbres quant ils atteignent leur taille adulte. Avant de sortir du parc, je vais probablement prendre un de ces arbres dans mes bras de manière à pouvoir profiter de leur énergie.
Je croise un Indien, un indien sur un vélo, cet homme est beau avec ses longs cheveux noirs qui volent au vent. Son cheval est un peu moins romantique que dans les films. Mais c’est une monture, disons moderne.

Je mets dans cet article les premier vers du poème d’Arthur Rimbaud, “le bateau ivre”, ces vers sont pour moi ce qui définit le plus comment ce pays me transporte, et je me rappelle d’une version dite par Léo Ferré, à quel point j’ai pu rêver dans les longs trajets qui me ramenaient entre la caserne ou ils m’ont enfermé pendant un an et le domicile que j’occupais à Bordeaux.

Comme je descendais des fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les hâleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

Demain, c’est la,dernière journée, je pense que c’est une journée que nous allons apprécier, car, au-delà de cette journée nous repartirons sur les chemins que nous avons pris chacun d’entre nous pour retourner vers nos familles, soit pour d’autres visites. Pour ma part, je vais m’arrêter à Montréal, faire des connaissances, rencontrer quelques praticiens narratifs impliqués dans le milieu hospitalier et d’autres personnes qui ont eu la bonne idée de s’intéresser à Paolo Friere.

Voilà, quelques sensations avant le retour. Demain les au-revoirs aux praticiens narratifs ayant donné à voir et à entendre de leurs travaux et à nos confrères présents, pour leur chaleureuses attentions.

Jean Louis

2 réflexions au sujet de « VOUS AVEZ DIT OUVERTURE ? »

  1. Jean-Louis,

    Ton texte me touche beaucoup. je sens en toi un amoureux de la nature, et ta double émotion devant ce colloque et la nature me remplit de joie

    A bientôt, que tu nous racontes encore plein d’autres souvenirs

    Fanny

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