André de Châteauvieux nous signale par l’intermédiaire du Réseau Aquitaine Coaching la parution d’un article intéressant sur le blog de Guy Lesoeurs, un article concernant la parution d’un nouveau brûlot anti-coaching, portant le titre délicat et nuancé de “je hais le développement personnel” (par Robert Ebguy, chez Eyrolles : le lire ainsi que le droit de réponse pathétique de R. Ebguy).
La contemption des coachs va de pair avec la mode du coaching et avec une certaine représentation qu’en donne la TV réalité, représentation qui conduit certains d’entre nous à s’interroger sur le mot de “coach” et ses diverses connotations. Le moins qu’on puisse dire est que le coaching est tombé dans l’abdomen public ! Ce mot est-il toujours adapté à la description de l’activité de ceux d’entre nous qui oeuvrent non pas à asservir l’individu mais à le libérer, à le rendre auteur de sa vie, à désincarcérer ses représentations du discours dominant forgé par les grandes entreprises en utilisant les résultats des focus groups organisés à prix d’or par des cabinets d’études de marchés dont le CCA (Centre de Communication Avancée) fondé par un grand gourou du marketing des années 70-80 (Bernard Cathelat) et donc notre auteur, le fameux Robert Ebguy, est un collaborateur salarié ! L’homme qui pourfend le développement personnel est donc un salarié d’une boîte d’études qui vend aux grandes multinationales des enquêtes de motivation des consommateurs visant à mieux les comprendre pour leur fourguer un peu plus de petits suisses. Joli, non ?
Par ailleurs, il y a du pognon à se faire et des livres à vendre en cassant du coach. J’étais intervenu par téléphone dans l’émission de lynchage organisé animée par d’Isabelle Giordano sur France Inter pour dire au psychanalyste Roland Gorri qu’il employait pour parler des coachs exactement les mêmes arguments que les curés au début du XXème siècle pour conchier les psychanalystes. J’avais publié une tribune dans “l’Express” au moment de l’émission pathétique “coachs, gourous et guérisseurs” sur Antenne 2… mais finalement, maintenant, je me suis calmé car je suis rentré en contact avec ma compasion pour tous ces auteurs haineux, pour leur pauvre ambition de se faire un peu de notoriété et un peu de droits d’auteurs aux dépens d’un phénomène dont un effet de mode a décollé progressivement la représentation caricaturale de sa pratique réelle.
Faut-il baisser les bras ? Certainement pas. Mais nos clients ne sont pas dupes. Ils savent très bien qu’un ouvrage dont le titre commence par les mots “je hais…” ne peut traduire que la relation douloureuse de l’auteur avec son histoire dominante personnelle, relation qu’il a exprimée par ailleurs en choisissant une activité où il exerce exactement ce qu’il reproche à la cible “extérieure” qu’il croit s’être choisie. Haut les coeurs, collègues, plutôt que haut le coeur !
Vous voudrez bien m’excuser mais si je rencontre un chien qui a la rage, tout en m’autorisant à avoir une compassion non feinte pour la pauvre bête, je ne m’aventurerai certainement pas à me demander si “il y a apparemment des notions qui lui échappent” ni “faire en sorte de comprendre lesquelles et comment le faire accéder à une autre réalité…”
Comme Pasteur en son temps, il me parait bien plus efficace de rechercher à la fois la source de la maladie et une solution pour s’en préserver, une action n’excluant nullement l’autre (cf. les fédérations de coachs, le droit de réponse et de défense d’un coaching éclairé et… la supervision !).
Quant à se “demander honnêtement comment l’attaque a-t-elle pu être possible au-delà même des raisons propres à l’adversaire…”, cela conduirait à rester inerte chez soi ad-vitam afin de ne pas prendre le risque de croiser un chien enragé, de prendre un pot de fleur sur la tête ou de glisser sur une peau de banane.
Quand Monsieur Ebguy dénonce “les pratiques du coaching qui “reprogramment les cerveaux”, reformatent les attitudes et comportements pour complier à une conformité dictée par l’entreprise, la société, les uns et les autres, sans respect pour la valeur intrinsèque de l’individu” (cf. le blog de Guy Lesoeurs http://guylesoeurs.com/2008/12/nous-irons-tous-et-toutes-au-bucher-des-coachs/), il se livre à une attaque rageuse des coachs et de leurs pratiques sans discernement ni distinction.
Ce non discernement dont fait preuve ce Monsieur est pour moi sans conteste source de réelle compassion, comme l’est toute manifestation de rage ou de colère qui indique que la personne (ou l’animal) échappe à son propre contrôle.
En creusant un tout petit plus loin, on découvre que Monsieur Ebguy travaille pour une entreprise dont “la fonction est de vendre des études qualitatives spécifiques (?) en organisant des focus groupes de consommateurs afin que les messages des produits ou des services promus par les firmes atteignent leur cible en fonction de critères socio-démographiques, d’usage et de consommation et psychosociologiques. C’est à dire que ce Monsieur est un spécialiste du projectif et du comportemental, pour mieux faire acheter…”
Alors qui manipule qui dans cette histoire ?
Qui défend quoi ou quelle chapelle ?
Quelle zone d’ombre résonne chez ce Monsieur qui le fasse s’en prendre ainsi au coaching dans son ensemble ?
Le « développement personnel » et l’élévation de la conscience individuelle et collective irait-ils à l’encontre de son propre business ?
S’intéresser à la source des émotions de Monsieur Ebguy me parait au moins aussi instructif si ce n’est davantage que de me demander quelle est ma part de responsabilité dans cette histoire…
Bien à vous
Il y a une différence notable entre penser que la compassion est une pose et penser qu’elle peut être une pose….Est-ce que penser qu’un sourire peut être faux suggère qu’on ne ressent pas ce qu’est un sourire? Il me semble que ce serait plutôt le contraire….Je trouve qu’il y a des attitudes de très grande valeur dans la philosophie du coaching et de l’accompagnement de la personne en général qui sont galvaudées et réduites à leur apparence, si je me réfère au fossé qui existe entre les propos faciles sur le coup et les comportements sur le long terme et à l’épreuve de la réalité. Quand à la bonne foi des adversaires est-elle indispensable lorsque ce qu’il disent n’est pas entièrement faux? Notre propre bonne foi suffit à elle -même pour débattre et nous améliorer. Mon idée est qu’il y a du ménage à faire dans la corporation (compétence, intégrité, absence de vénalité) et que ce n’est pas en rejetant toute attaque en bloc qu’on la défendra le mieux. N’y a t-il pas un vieux principe chinois qui conseille de respecter son adversaire quel qu’il soit au lieu de le sous-estimer? Par ailleurs, l’autre idée n’est pas de défendre l’adversaire et de lui trouver de bonnes raisons (quelque chose du genre du syndrome de Stockholm) mais de se demander honnêtement comment l’attaque a-t-elle pu être possible au-delà même des raisons propres à l’adversaire. Si je déteste les chiens parce que j’ai été mordue dans mon enfance et que j’ai envie de leur nuire jamais je n’irais leur faire le reproche de miauler…ce serait particulièrement inefficace comme attaque, non?
Il est intéressant de voir comment nous nous enflammons tous dès qu’on parle des bûchers. “Remettons-nous en question, nous n’allons quand-même pas condamné les pauvres inquisiteurs … qui ont tant souffert des coups de fouets etc” . Personnellement, lorsque j’ai entendu parler du coaching j’ai eu l’image du cheval et du fouet. Et cette vision négative m’a interpellé, éveillé ma curiosité et j’ai eu envie de découvrir plus – j’ai découvert un univers où je pouvais faire ce que je veux avec ce que je suis.
C’est vraiment intéressant cette image de la princesse au petit pois. Je pense que l’on peut et doit débattre quand l’adversaire est de bonne foi. Afficher une supposée haine (encore que ce sont les commerciaux des éditeurs qui fixent les titres) suggère que les dés sont pipés. Lorsqu’on a appris à utiliser un marteau, on ne voit que les clous. c’est sans doute pour cela que les gens qui voient des gourous et des manipulations partout sont souvent concernés personnellement par le sujet (ça vaut aussi pour moi, of course). Par contre, penser que la compassion est une pose suggère qu’on ne la ressent pas vraiment.
Les coachs et la supervision…..combien ont le courage de prendre le risque? (c’était une parenthèse)
La compassion….est-ce que cela ne revient pas à se dédouaner, dire “le pauvre, pardonnez-lui il ne sait pas” et ne pas se remettre en question ou couper court en fait à la discussion? (quand la compassion n’est en réalité que de la condescendance)Dans un débat passionné il y a le débat et la passion : n’est-il pas intéressant d’écarter la passion tout en maintenant le débat. Si ce livre a vu le jour il y a des raisons à cela, est-ce bien “coachy attitude” de ne pas entrer en discussion avec son auteur, de ne pas lui dire “oui c’est vrai, de votre point de vue et à maints égards les faits vous donnent raison…mais êtes vous certains de ne pas confondre “coaching” et “pratique du coaching” comme d’autres ont confondu “nucléaire” et “usage du nucléaire”. Plutôt que de dire : “ce monsieur a des problèmes” (parce que en substance c’est ce qui est dit, même sous des dehors qui se veulent élégants et bienveillants parce que c’est de bon ton dans la profession même si l’intention n’y est pas), ne serait-il pas plus pertinent de dire : “il y a apparemment des notions qui lui échappent et on va d’une part faire en sorte de comprendre lesquelles et comment et d’autre part de le faire accéder à une autre réalité, celle qui mérite d’être connue du public et favorisée par lui à la place de celle qui est diffusée actuellement”. Autrement dit le coaching souffre de l’image qui est donnée de lui et de la méconnaissance manifeste de ce qu’il représente. Ce n’est pas en nous réfugiant derrière de grands airs qu’on arrangera les choses…je crois qu’il faut relever les manches et aller au charbon sans jouer les princesses au petit pois.
Bonjour Pierre,
Je suis parfaitement d’accord avec vous sur le fait que devant tout déferlement de haine ou de colère quel qu’il soit, la bonne attitude ne peut être que la compassion. Il n’est en effet pas un instant, pas une seconde au cours desquels, en nous exprimant, nous ne parlions de nous même.
Ainsi lorsqu’un psychanalyste, des philosophes ou un sociologue crient haro sur le coaching, ils ne font qu’exprimer leur incapacité à travers leur pratique à agir dans l’ici et maintenant. C’est toute la “faiblesse” de leur pratique face à une réalité humaine, complexe et mouvante qu’ils mettent à nu. Plus ils critiquent et critiqueront, plus ils font et feront aveu de faiblesse, inscrivant le débat dans un lutte de « pouvoir ».
Plus ils critiquent et critiqueront, plus ils mettront en valeur la capacité de pratiques telles que le coaching à avoir un impact réel sur ceux qui ont le courage d’oser véritablement se regarder en face. Les premiers de ceux-là étant les coachs eux même qui savent bien, à travers leur pratique et/ou leur supervision ce qu’il en coute mais aussi ce qu’ils y gagnent !
Bien à vous
Stéphane Einhorn
On dit que la bave du crapeau n’atteint pas la blanche colombe…Ce genre de débordement n’est-il pas le signal qu’il y a du ménage à faire dans notre profession et qu’il serait temps maintenant de nous appliquer les uns et les autres à restaurer une image saine de notre profession et la nettoyer des maux suivants qui sont encore denrée courante : mercantilisme, incompétence, esbrouffe et putasserie commerciale…..
Certes le grand public n’est pas encore très au fait de ce genre de débat mais à partir du moment où de tels ouvrages commencent à voir le jour il faudrait peut-être justement s’inquiéter de ce que cela signifie pour l’avenir, comment cela est-ce possible au-delà même de l’histoire personnelle de l’auteur (qui serait aussi celle de son éditeur qui aurait accepté le manuscrit par passion et non par anticipation commerciale?)
Commençons par être cohérents et congruents, soyons à l’image de ce que notre mission nous demande d’être…et pas seulement à l’image.
Si Robert Ebguy trouve son salut dans la haine, c’est à lui de s’interroger!
Allez ,nous le faisons pour lui: qu’aimez-vous ou bien qu’hai..mez-vous?
le “n”(haine) et le “m”(aime), vous l’avez compris sont des sujets de tromperie faciles pour les dyslexiques, et pour nous?!!
Ah la tromperie, j’arrète là a bientot
Cher Pierre,
J’ai rencontré des usurpateurs à la tête d’écoles de coaching, des moneymakers manipulateurs, “se gavant” de pognon sur le dos de personnes licenciées et perdues.
J’ai rencontré des formateurs scrupuleux et sympathiques, gérants d’autres écoles.
L’habit ne fait pas le moine, un médecin n’a pas toujours le don de soi, l’appartenance a une société à but caritatif peut s’avérer du registre de l’hameçonnage.
Ah ! le triangle dramatique ! Oh ! bucher des vanités !
Et à l’amour que je porte à ceux qui aiment leur travail et la justesse, à défaut de justice.
Je ne connais pas le “brûlot”, mais la réponse me paraît tout à fait excessive et son impact stérile. Pourquoi, en effet, tant de haine et si peu de remise en question et de compréhension. Les uns sont-ils tous bons et les autres tous mauvais. Pourquoi imaginer que tout est perversité et intérêt mercantile? Peut-être n’y a t’il qu’une mauvaise expérience. Ne pourrait-on pas ouvrir la discussion et engager le questionnement, plutôt que camper sur ses positions et adopter une position de défense tribale?
C’est un débat vieux comme le monde : le terme “coach” est-il galvaudé? oui, il l’est il y a même des coachs “chocolat” chez Nestlé!!!!
Mon avis en tant que coach est que
1) c’est débat entre initiés, le grand public ne sait même pas ce qu’est un coach ! donc franchement, avant de s’énerver contre cela
2) c’est vrai qu’il y a certains coachs dangereux notamment ceux qui se prennent pour des psy
3) bonne ou mauvaise comme dit Gainsbourg : c’est toujours de la pub !
4) J’aime les contre pouvoirs ça me rassure et c’est sain.
Heureusement qu’il y a des gens qui nous critiquent ça nous permet de pas nous prendre pour D.
Merci Roland Gorri, merci Robert Ebguy…